samedi 22 février 2020

Pourquoi élaborer une méthode d'écriture?

Après discussion sur Twitter avec une autrice sur sa méthode de travail, j'ai décidé de faire la même chose, mais aussi de parler de mon processus créatif.

Quand j'ai commencé, vers 17 ans, à écrire des fictions, il ne m'était jamais venu à l'esprit qu'il me faudrait trouver une méthode de travail. J'avais une idée, je la mettais en forme et je tapais au kilomètre, sans trop me poser de questions. Sur des textes courts, ça peut fonctionner. Sur des sagas du genre Game of thrones, à moins d'être un extra-terrestre, je ne vois vraiment pas comment on pourrait s'en sortir, de tête, avec toutes les intrigues, les nombreux détails sur chaque personnage, les lieux etc sans avoir des outils pour s'aider.

Il m'a néanmoins fallu très longtemps avant de m'en rendre compte, parce que j'ai justement commencé par des textes courts (poèmes, nouvelles, théâtre), parce que ma première préoccupation était le style (que la poésie m'a permis de travailler), l'élaboration de personnages complexes (l'écriture de nouvelles aide) et les dialogues (coucou le théâtre). Je n'ai vraiment attaqué le roman qu'en 2010. Et là, j'ai très vite percuté que j'avais un problème. Style, personnages et dialogues peuvent être médiocres dans un roman (coucou Dan Brown ou Mireille Calmel), mais pas sa structure. L'histoire doit être bien amenée et accrocher le lecteur du début à la fin, elle doit être cohérente et vraisemblable, sinon c'est perdu.

Bien sûr, il doit être possible d'écrire un court roman (et peut-être même un long) en y allant au feeling, à l'instinct, mais pour cela j'imagine qu'en plus d'une cervelle bien faite, il faut être rentier, ne pas avoir de vie de famille ou d'amis. Rester focus sur son travail, tous les jours, sans autre préoccupation et avoir une idée claire dès le départ. Mais ce n'est pas du tout mon cas. Je peux rester six mois sans écrire une ligne, sans avoir même l'occasion d'y penser ne serait-ce qu'une minute. Et quand enfin je m'y replonge... c'est à la fois très long et très laborieux de tout me remettre en tête. Au point que parfois j'ai juste le temps de m'immerger dans mon univers que je suis déjà happée par le travail, ou divers soucis. Frustrant.

Des romans, j'en ai écrit plusieurs. Et chaque fois, ce même constat: c'est totalement déstructuré, mal amené. On sent que je ne sais jamais exactement où je vais, que je dois bidouiller pour coller certains éléments. C'est un peu comme une oeuvre plastique avec plein de ruban adhésif partout.

L'avantage, néanmoins, c'est que c'est plaisant à écrire. On découvre son univers progressivement, on enrichit ses personnages, on s'excite à chaque nouvelle idée... Et quand on a placé le point final, comment on est trop fier de cet amoncellement de coups de génie! Oui, sauf qu'une fois l'excitation passée et qu'on peut se relire à froid: ouille! Ca pique. Non, décidément, ça n'a aucune place parmi tous les livres qui composent ma bibliothèque. Oui, il y a de bons passages, de bonnes idées, mais ils ne sont pas liés correctement. Des bouts de scotch. Dan Brown et Mireille Calmel sont infiniment meilleurs que moi, la petite prétentieuse.

J'ai fait ce douloureux constat avec mon précédent livre: Des Ruines et des esclaves. A la base, il s'agissait... d'un recueil de nouvelles. Et allez savoir pourquoi, j'ai voulu transformer ça en roman. Des bouts de scotch partout pour faire coller des histoires qui n'avaient à l'origine aucun rapport les unes avec les autres. Pour un bidouillage d'une telle ampleur, je m'en suis trop mal sortie. Je n'en ai pas honte. Je trouve qu'il y a du bon. Mais ça m'a quand même décidée à revoir totalement ma méthode de travail.

Je me suis alors relancée dans un nouveau projet: la suite. L'idée était d'en faire un plan ultra-détaillé. J'ai abandonné très vite, parce que c'était beaucoup trop laborieux, parce qu'il aurait fallu que j'invente une méthode pour élaborer ce plan et parce que savoir d'avance, précisément, où j'allais m'enlevait tout plaisir d'écriture. Sans compter les idées qui me venaient en cours de route et qui me forçaient soit à les jeter à la poubelle, soit...à retravailler le plan sur lequel j'avais passé des jours depuis le début. Très mauvaise idée. 

J'ai alors décidé d'attaquer Les Métamorphoses, un projet qui me traînait dans la tête depuis très longtemps, mais que j'avais toujours délaissé parce que manquant d'ambition. Du divertissement pur et dur qui, à mon sens, ne pourrait toucher qu'un public très restreint et risquait de me valoir une étiquette négative. Un roman érotico-fantastique, rendez vous compte... C'était absolument parfait pour travailler ma méthode, m'entraîner. Plaisant à écrire puisque c'est du divertissement, sans aucune pression, dans un genre où les exigences littéraires sont plutôt faibles. Si je me plante, ça n'a aucune importance, ce n'est pas quelque chose qui me tient particulièrement à coeur. Et si je réussis, j'aurai trouvé la bonne formule pour mes prochains projets et peut-être même que ça pourra m'ouvrir quelques portes, finalement.

Et comme cet article est déjà bien long (c'est désagréable la lecture sur écran, hein?), la suite dans un prochain épisode.

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