lundi 17 février 2020

Pourquoi il faut lire Irvine Welsh

Le sondage que j'ai lancé sur Twitter a parlé: mon premier article sera consacré à l'un de mes auteurs favoris, l'Ecossais Irvine Welsh.



Comme beaucoup, j'ai découvert cet auteur grâce au film Trainspotting réalisé par Danny Boyle. C'est Le film qui a lancé la carrière de l'immense Ewan Mc Gregor, mais il s'agissait surtout d'un véritable hymne punk pour toute ma génération, et sans doute aussi pour la précédente.


J'ai donc commencé par ce livre éponyme qui a été une véritable claque littéraire. Welsh laisse ses personnages raconter leur propre histoire, des tranches de vies totalement déglinguées par la drogue, le chômage et les relations hautement toxiques. La plupart de ses personnages sont des ordures de la pire espèce qui commettent des horreurs difficilement soutenables. C'est de cette façon que Welsh racole ses lecteurs: par la provoc, le trash mais il le fait pour la bonne cause. Ce n'est absolument pas gratuit.
Car Welsh s'inscrit dans la lignée des Zola et autres Flaubert: il explique, au fil de ses bouquins, comment ces ordures, ces Thénardier (pour remonter encore plus loin dans l'héritage), en sont arrivés là. Il nous parle du déterminisme social, des ravages de Thatcher, de l'abrutissement des masses... Dans Glu, il montre comment l'amitié et les valeurs peuvent devenir un véritable enfer. Trainspotting, Porno, Skagboys, Glu s'ancrent dans une cité d'Edimbourg sans présent, sans futur, sans espoir, à moins d'agir en égoïste et de façon intelligente. Les gentils crèvent comme des merdes, les méchants survivent et les autres fuient, en permanence.
L'oeuvre de Welsh permet de comprendre le monde et les rapports sociaux chez les pauvres. Si vous cherchez un auteur qui vous aide à vous sentir mieux, passez votre chemin. L'humour est très présent dans ses livres, mais il est désespéré. Ils sont néanmoins complets: intéressants, intelligents, émouvants, drôles...
Du moins jusqu'à Glu. Par la suite, Welsh a déménagé à Miami. Lui aussi a tenté de fuir son environnement, son milieu. Lui aussi a essayé de se détourner de ces personnages pour trouver la lumière. Mais il semble avoir perdu la flamme. Même quand il retourne dans son univers d'Edimbourg et qu'il prolonge l'histoire de ses personnages fétiches, l'intensité n'est plus la même. Skagboys est un bon livre, mais plus superficiel que les autres. Idem pour La vie sexuelle des soeurs siamoises. Je le vois comme ces groupes de rock qui s'acharnent à sortir des albums sans trop savoir pourquoi, qui ont perdu l'énergie, la folie de leurs virevoltants débuts. Je le lis avec plaisir, mais aussi avec un peu de gêne. DMT insinue en moi une certaine nostalgie, je prends plaisir à retrouver cette ordure de Sick Boy, ce psychopathe de Begbie, ce malheureux Spud, mais je referme le livre avec un désagréable sentiment de platitude, une déception. Parce que Welsh m'a fait monter si haut dans l'exigence littéraire que la moindre baisse de forme me saute aux yeux.

C'est vous dire s'il faut dévorer au moins ses premiers livres: Trainspotting, Ecstasy, Porno, Recettes intimes de grands chefs, Glu...
Et bip up aux traducteurs, parce que retranscrire l'argot écossais dans la langue de Molière doit être particulièrement compliqué.

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