dimanche 21 avril 2024

Critique: L'Appel de la forêt, par Jack London

 


Après Martin Eden, voici L'Appel de la forêt. Ce prolo devenu référence dans le monde littéraire exerce une certaine fascination sur moi. Il a appris seul, avec plus que de la détermination, de l'acharnement, à une époque très éloignée de la création d'Internet, de Wikipédia et des conseils de Christophe Siébert sur le blog de la Musardine.

Ça force le respect.

D'ailleurs, j'ai l'impression que London ne parle que de lui, sans parler de lui. Ici, il est question d'un énorme chien, parfaitement domestiqué et tranquille, qui redevient sauvage une fois plongé malgré lui dans la ruée vers l'or.

Quand on connaît un peu l'histoire du bonhomme, et qu'on a lu Martin Eden, ça devient évident que ce conflit intérieur entre l'instinct qui l'a poussé à voyager à travers le monde et à se bagarrer à de nombreuses reprises, et la raison, la civilisation qu'il a voulu rejoindre, par amour.

Mais je vais éviter l'étude psychanalytique qui en dit en général bien plus sur celui qui s'y abaisse que sur le sujet d'étude.

Nous avons donc un roman raconté du point de vue du chien, Buck, ce qui surprend mais m'intéresse beaucoup parce que j'ai un projet qui s'en rapproche. En plus déjanté.

J'ai mis un peu de temps à rentrer dans l'histoire, pourtant courte, sans doute à cause de la cruauté du début. Ensuite, comme Buck, je me suis adaptée.

Ce que j'apprécie, c'est que London n'a pas besoin d'interminables descriptions pour planter son décors. Il a connu le Yukon de très près donc il en parle naturellement, avec simplicité. C'est un prolo qui parle à tout le monde avec un vocabulaire accessible.

Je parle de cet aspect parce que j'ai enchaîné avec Théophile Gautier et... c'est pas la même. Je suis à 48% du bouquin et il ne s'est toujours rien passé. Mais une chose à la fois, j'y reviendrai d'ici peu.

L'Appel de la forêt peut être lu par tout le monde, y compris des enfants, il est instructif, bien écrit, intelligent et divertissant. Sans avoir l'air prétentieux (et pourtant, pour son auteur, d'une certaine manière, il l'est autant que possible), ce livre répond à tout ce qu'on peut en attendre. 

dimanche 14 avril 2024

Critique: Jésus contre Hitler, par Neil Jomunsi


 

J'en suis bien navrée, mais on part sur une nouvelle critique négative.

Avec la saga du Bourbon kid, j'ai eu envie de persister dans le "what the fuck", alors j'ai tenté ce court roman sans prétention qui m'a tapé dans l’œil: Jésus contre Hitler.

Il a l'avantage d'être très court. Et c'est à la fois une bonne et une très mauvaise chose.

Parce que ce roman, c'est une vanne. Il repose entièrement sur ce concept WTF, efficace, puisqu'il m'a tapé dans l’œil. Sauf que Neil Jomunsi n'en a pas profité pour m'en mettre plein la vue. Il aurait pu m'éblouir par son style, son sens de la formule. Il aurait pu me faire rire en multipliant les ruptures de tons. Il aurait pu m'impressionner par la richesse de son univers. Il aurait pu me clouer en me prenant à rebrousse-poils, à m'expliquer pourquoi il faut arrêter avec cette littérature WTF...

Mais non. C'est juste Jésus contre Hitler, sur 89 pages. C'est superficiel, c'est caricatural, ça manque de maîtrise, d'un minimum de profondeur. Donc même si c'est très court, la vanne s'épuise très vite. Les personnages restent des coquilles vides auxquelles on ne peut pas s'accrocher. Il aurait donc peut-être fallu que ce soit un peu plus développé.

Dans les premiers romans de la saga du Bourbon kid, c'est hyper riche. C'est caricatural à mort, mais cet aspect est très bien utilisé, c'est assumé, réfléchi, jouissif. L'histoire est bien amenée, on a envie de passer du temps avec tous les personnages, de mieux les connaître.

Là, on se rapproche plus du dernier opus de la saga, Kill the rich, mais pour moi c'est même encore deux crans en dessous.

Cela dit, je trouve ça intéressant de lire des romans qui ne fonctionnent pas. Ça permet de comparer et de réfléchir, justement, à ce qui ne va pas et pourquoi. Je note, aussi et néanmoins, qu'il y a un public pour ce type de littérature.

La prochaine fois, je vous parlerai de L'Appel de la forêt, de Jack London que j'ai terminé il y a quelques jours. Ça va pas être la même ambiance.


dimanche 7 avril 2024

Critique: Kill the rich ! par anonyme

 



C'est une amie qui m'a fait découvrir, il y a une paire d'années désormais, la saga du Bourbon kid, avec Le Livre sans nom par un auteur anonyme. Je suis tombée amoureuse du concept et de son audace.

Dès la première page, une question est venue me tabasser le crâne et elle ne m'a plus jamais lâchée: "Comment c'est possible?". Dès l'incipit, on est confronté à tout ce que je m'interdisais de mettre dans mes propres récits: des clichés monstrueux par palettes entières et de l'humour scato poussé à l'extrême. Et pourtant, ça marche.

J'ai lu le premier opus de cette saga dans un jouissif état de sidération, du début à la fin. Alors, j'ai lu deuxième et puis le troisième... Pour renouveler l'expérience, et pour comprendre.

Je pense avoir compris. Tout est question de dosage, d'équilibre. C'est comme les films de Tarantino dont l'esprit hante chaque page. Il y a tous les ingrédients pour aboutir à un infâme nanar et pourtant, ça marche. Parce que c'est assumé, parce que c'est articulé de façon intelligente, parce que c'est maîtrisé, parce qu'il y a une vraie structure et un vrai style pour porter tous ces clichés...

C'est ce qui fait toute la différence avec un premier roman écrit par un ado.

Le problème, c'est qu'au-delà des trois premiers opus, ça ne fonctionne plus. Déjà, dans Le Cimetière du diable, j'ai senti l'édifice s'ébranler sévère. L'effet de surprise s'estompe, l'humour scato commence à devenir lourd et les personnages perdent leur aura.

Et à chaque nouveau roman, la qualité se dégrade un peu plus.

J'ai pourtant continué à lire, parce que ça me faisait marrer, parce que ça me change de la production habituelle et des "classiques de la littérature". Ça m'encourage: je me dis que c'est moins bon et pourtant, ça s'édite et ça se vend quand même.

Mais sur Kill the rich !, je pense qu'anonyme en a marre.

Je n'aime pas me montrer méprisante, je préfère la bienveillance, même quand j'ai pas aimé, mais là, notre auteur a foutu en l'air son univers et j'ai l'intuition que c'est volontaire.

L'écriture est beaucoup moins soignée, réfléchie que par le passé, sans même parler des trois premiers. Les personnages se font saccager. On sent dès les premières pages que l'auteur n'en peut plus de Sanchez, alors BAM! Mention spéciale, bien sûr, pour le kid, qui n'en est plus un, qui est allé au bout de son histoire, de sa mythologie et qui n'a donc plus de raison d'être, mais qui est quand même toujours là, qui tire sur la corde de façon insensée et qui en perd tout son intérêt, tout son charisme.

Et il se trouve que c'est sa saga, c'est censé être le personnage central. Ce n'est plus le cas et de toute façon tous les personnages sont devenus des caricatures d'eux-mêmes, alors qu'ils étaient déjà des caricatures.

J'ai donc souffert sur 540 pages à voir les personnages que j'aimais se faire ainsi maltraiter par leur propre créateur, qui n'y croit plus.

C'est triste, mais je pense qu'il est plus que temps de passer à autre chose. En tout cas, c'est ce que je compte faire, en ce qui me concerne.

Merci pour le fun, anonyme. C'était très cool, au début.